En compagnie de Kris, Étienne Davodeau s’éloigne (un peu) de son Maine-et-Loire natal pour nous plonger, avec “Un Homme est mort”, dans le Brest ouvrier de 1950, le Brest confronté à la terrible répression policière qui coûta la vie de l’ouvrier Edouard Mazé, abattu d’une balle en pleine tête par un garde mobile (tirant sur ordre).
La trame du récit est celle de l’équipée de René Vautier, jeune cinéaste militant déjà célèbre, qui débarque dans un Brest dévasté par les bombardements et en état de siège, immédiatement après l’assassinat d’Edouard Mazé. Chargé par la CGT de filmer les obsèques (auxquelles participent plusieurs dizaines milliers de personnes), il réussit à faire d’un court métrage d’une douzaine de minutes l’expression même du mouvement ouvrier de revendications salariales de mars et avril 1950. N’ayant pu faire de bande son, il va le projeter plus d’une centaine de fois en différents lieux de la ville, avec les moyens du bord, en faisant dérouler une bande magnétique où il récite le poème d’Eluard "Un Homme est mort". Hélas, le film finit par se désintégrer et même le texte du poème, réenregistré et transfiguré par un ouvrier brestois, disparaît... Le pari de la BD était de faire revivre ce film et cette aventure. Incontestablement, c’est tout à fait réussi. Loin d’un didactisme rigide qui aurait nui à son propos, elle restitue toute l’humanité et les espoirs des protagonistes, rendant ainsi justice une cinquantaine d’années plus tard à une lutte exemplaire de solidarité ouvrière.
De surcroît, un dossier très bien illustré en fin d’ouvrage permet de comprendre tous les enjeux historiques comme la genèse de la BD elle-même.
A lire au plus vite !